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Donnez de l’avoine à un âne, il vous paiera avec des coups de pieds.Proverbe français 5 mai 1918, 12h37, Villa de la famille Hindenburg, Hanovre (Allemagne) S’il faut établir une culture à grande échelle du virus, combien de temps cela prendra-t-il ?La voix du maréchal est calme et posée, mais Hoffman n’en croit pas ses oreilles. Le chimiste vient de traverser l’Allemagne de nuit sans même prendre le temps de dormir pour expliquer la situation au chef de l’État-major allemand, et celui-ci fait comme s’il n’avait pas écouté une seule seconde de son exposé. Sauf votre respect, maréchal, je viens de vous expliquer que conserver ne serait-ce qu’une souche du virus est éminemment dangereux. Mon équipe travaille actuellement pour savoir s’il est possible d’appliquer la technique du vaccin à cette grippe, et c’est bien la seule raison pour laquelle nous n’avons pas détruit la souche que j’ai trouvée ! Établir une culture à grande échelle n’est…Un vaccin ? Ne soyez pas ridicule, Hoffman ! Certes, le vaccin marche à merveille pour la peste ou la rage, mais s’il était possible de se vacciner contre quelque grippe que ce soit, cela se saurait !A défaut de tenter de créer un vaccin, les études que nous allons mener sur le virus nous permettront de mieux le connaître, et donc de mieux le combattre. Pensez aux nombres de soldats sauvés dans nos tranchées si nous trouvons un moyen de nous défendre contre cette grippe…Hindenburg reste silencieux de nombreuses secondes après cette remarque. Hoffman a visiblement touché une corde sensible. Il décide d’enfoncer le clou. Sans compter les conséquences sur le moral de nos troupes. Imaginez que l’on arrive à appliquer la technique du vaccin à cette grippe espagnole… Je vois d’ici la une du Allgemeine Zeitung : « Le Reich met à terre La Grande Tueuse ».Après une longue pause, Hindenburg réagit enfin. Soit. Je vous donne l’autorisation de poursuivre vos études sur le virus. Le Reich donnera tous les moyens nécessaires aux laboratoires Bayer pour mettre au point un vaccin. Mais j’insiste : parallèlement, je souhaite que dès demain vous commenciez une culture massive de ce virus. Que tout ce projet reste discret : personne ne doit être au courant de vos découvertes. Il en va de l’issue de la Guerre. Ne comprenant ni cette dernière phrase ni la volonté du maréchal, Hoffman opine silencieusement et quitte prestement le salon. Il doit faire vite s’il veut rejoindre son laboratoire avant la nuit, qui s’annonce blanche une fois de plus. |
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