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Récit : « Walking Ghost Phase. »

SommaireChapitre 1Chapitre 2

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Chapitre 2 : L'évangile selon Jean.
(citation)
Les saints hommes ne sont plus, et désormais les évangiles sont écrits par des pécheurs et des impénitents.

Journal de Meurs-Bien-Vite... Toujours. Treizième jour après la Toundra. Je crois...


Je suis toujours sur la route. Quelque chose ne tourne pas rond. Je crois que j'ai des absences. J'ai écrit quelque chose, cette nuit... et je ne m'en rappelle pas. Qu'est-ce que ça veut dire ? Est-ce moi ? Que signifie cette histoire ? Et pourquoi ce sentiment de déjà-vu, en la lisant ? ...




Le Voyageur.


Un vent chaud et sec soufflait, lui glissant le long de la nuque, soulevant les cheveux qui dépassaient de son chapeau, lui projetant même du sable à la figure - ce qui l'avait poussé à rabattre le bord avant du chapeau, afin de ne pas se prendre trop de sable dans les yeux. Il avançait, une main pinçant son couvre-chef pour l'empêcher de s'envoler, une autre se servant d'une grande pelle comme bâton de marche. Il avançait, et sentait le contact chaud du sable qui pénétrait dans ses bottes. Il avançait, impassible, fixant son but du regard.

Le vent s'intensifia, et l'homme dût abaisser son avant bras gauche au niveau de ses yeux. Il respirait peu et doucement, parce qu'ici, le sable s'incrustait jusqu'au plus profond de l'être, déstabilisant les fragiles engrenages du corps humain. La marche était plus difficile, mais il approchait. Il ne distinguait plus que les contours du bâtiment. On aurait dit qu'il ne respirait plus, tant son visage était figé, et tant le vent couvrait tout bruit. De toute façon il avait un morceau de toile, sous le chapeau, qui lui couvrait les oreilles. Il se rappelait que ce morceau de tissu que l'on utilisait pour se protéger du sable avait un nom, mais il ne s'en souvenait pas. Il approchait.

Une porte en vieux bois s'ouvrit violemment, dans un fracas de bruit et de poussière, et du sable s'engouffra dans la pièce sombre. L'homme avança, et referma la porte d'un coup de botte. Enfin, refermée... il avait défoncé la serrure. Il grogna, mécontent. Et se tut aussitôt, tendant l'oreille. Il ferma les yeux, et essaya de faire abstraction du bruit du vent. Pour les rouvrit, calmement, et avança vers ce qui semblait être une cave.



Peur, peur indomptable. Un regard terrifié à sa jambe gangrénée. Toutes les pilules qu'il avait pris n'auraient servit à rien ! Si seulement quelqu'un pouvait arriver, et l'aider ! Trop vieux pour résister à des "revenus", trop blessé pour tenir dans le désert. Si seulement quelqu'un pouvait arriver, et l'aider ! Mais qui viendrait, avec cette tempête ? Au moins, pas de non-morts non plus. Ou peut-être que si ? Si seulement quelqu'un pouvait arriver, et l'aider !

Tremblant, gémissant, grinçant tantôt, sous la douleur ou la peur, angoissé par la solitude, et l'obscurité. Heureusement qu'il avait encore cette lampe, des provisions, ce matelas, et ce vieux ours en peluche, qui appartenait à son fi.... Ah !
Et comme chaque fois qu'il posait ses yeux sur cet objet décharné, il se mit à pleurer. Il le gardait, comme s'il avait besoin de ce lien, le rattachant à un si lourd passé ! Le vieil homme continua à hoqueter de tristesse, des petites larmes coulaient sur sa joue, tombaient sur la peluche qu'il serrait dans ses bras. Parfois, il interrompait ses gémissements pour frémir de douleur, et n'arrivait pas, pendant des heures, à se détacher de sa tristesse, ni de l'angoisse du mal qui grandissait en lui.

Mais ce jour là, un bruit sourd au dessus de lui, se détachant du sifflement morne de la tempête, le pétrifia. Il tendit son bras, glissa sa main sous son matelas, n'osant même plus respirer. Il se rassura au contact de la crosse du vieux revolver. Il l'approcha de lui, et tendit l'oreille. Outre le vent, seul un silence angoissant régnait. Il attrapa précautionneusement le chargeur, et l'emboitant doucement dans l'arme. Le vieil homme parut satisfait de ne pas faire de bruit, et sourit un peu, déformant les rides de son visage. Puis, il tira doucement sur la culasse... encore un peu... voilà, le pistolet est armé, maintenant... merde !
La culasse avait glissée entre ses doigts, et émit un son claquant pour signifier qu'elle avait fait son œuvre.

Horrifié, il s'immobilisa, tenant fermement l'arme de ses deux mains.


L'homme avançait toujours vers les escaliers, lentement, mais d'un pas naturel. Ses bottes ne produisaient pas le moindre son en frappant sur la pierre. Il descendit tranquillement les marches, et alors, il aperçut...


Un homme ! Un vivant ! Bon Dieu, des jours qu'il attendait ça ! Fou de joie, le vieil homme baissa son arme, et lança à la silhouette qui était apparue dans l'escalier, d'une voix faible et chevrotante, mais ostensiblement soulagée:
"Pardonnez-moi, je vous avais pris pour une de ces cochonneries ! Venez ici, que je vous voies mieux ! Soyez le bienvenue ! "


... avait prononcé à son encontre l'être rachitique qui logeait dans ces lieux. Bien... pourquoi pas.


Un frisson parcouru le vieil homme quand il distingua les traits du voyageur. Il ne paraissait pas vieux, bien que sa peau soit marquée par le soleil, le sable et le vent, et pourtant... Il paraissait sans âge, comme... non, il n'avait jamais vu pareille chose. Et quelque chose de malsain se dégageait de tout son être, contrastant avec son regard doux et paisible. Il rompit le silence, comme pour se rassurer.
"Ma parole, vous devez être envoyé par la Providence !"

"Peut-être."
Il était armé, donc dangereux. Et la puanteur caractéristique de la pourriture. Merde.

N'écoutant pas la réponse, il reprit, demandant d'une voix timide, et apeurée... "Hem... dites-moi, je suis très malade, est-ce qu'il vous resteraient des médicaments ? Je ne suis pas difficile, et vous ne refuseriez pas un bon geste envers un vieil homme ?"

Il se rappela qu'il n'avait pas de médicaments.
"Non, en effet."
Il plongea sa main dans sa poche.

Le vieil homme fixait cette main salvatrice, éperdu de reconnaissance, et déjà ses yeux se mouillaient de joie.

"Voici."
Il tendit la main, la paume vers le sol, à moitié repliée sur son pouce.

Il tendit la main, la paume vers le ciel, tremblante, comme prête à recevoir un cadeau du Grand Créateur.

Il approcha encore sa main de la main squelettique, arriva juste au dessus.
Sa main s'ouvrit, et...

Elle fit un bruit sourd, quand elle tomba. Elle roula un peu, et s'immobilisa. Le corps maigre ne bougeait plus.

L'homme resta un instant sans bouger. Sa pelle se tintait de sang. Il se redressa.
Il sourit.

Jour vingt après la Toundra des Chairs.


Ressusciter.



Le soleil s'est présenté à mon visage blême. Le soleil en fut étonné, car ce n'est jamais le même.

Mon âme se noie. Le désert me change, je le sens au plus profond de moi même. Cette saleté tenace entre et s'incruste en moi, dans chaque recoin. Je suis contaminé par cette crasse sèche. J'ai jeté mon miroir de poche. Il m'angoissait.

Une lucidité extrême m'empoigne, me frappe au visage, me bat. Alors que le petit morceau de verre rayé git au milieu de l'immensité, de gigantesque miroirs apparaissent et m'enserrent. Je ferme les yeux, et mon esprit s'affole, pris au piège avec moi même. La folie est si douce quand elle s'active derrière mes yeux, dans l'ombre, cachée. Un tyran cruel force à présent mes yeux à regarder en arrière. C'est insoutenable.
Je vois défiler tour à tour mes meurtres, mes trahisons, mes lâchetés, mes bassesses. Je vois un visage de glace éclater d'un rire plein de vice et de cruauté. Si seulement ce visage n'était pas le mien ! Les spectres de mes victimes se regroupent et m'assaillent, comme des âmes n'ayant plus rien à perdre, puisqu'elles ne sont plus rien. Et ce monstre partageant mes traits qui les regarde d'un sourire sarcastique.

Puis un choc violent dans la poitrine. Le rire est coupé net, et les traits se distordent, horrifiés. Le masque cynique et sarcastique s'effrite, se craquèle, se disloque. Est-ce mon visage, que je vois apparaître en dessous, ou un nouveau masque ? Je suis seul, et les ténèbres me renvoient mon reflet. Des voix aimées et pourtant oubliées me mettent à genoux, m'achèvent de leur déception, je ne suis plus que honte.
Comment diable un homme peut-il se transformer en un tel monstre ? Aveuglé par la terreur des abominations revenues d'entre les morts, je n'ai pas remarqué que j'étais devenu un être plus horrifiant encore,.

Et soudain une étoile. Et soudain une lumière. Soudain mes neurones s'électrifient, et une voix familière murmure à mon oreille...
(citation)
Quoi que tu fasses ce soir ou demain, si tu veux nous retrouver, va vers le nord, va vers la base militaire de Rohère, nous essaieront d'y accéder, et d'y tenir quelque t...

Les yeux humides, je relève la tête, et je cherche activement ma boussole, et mon carnet de route. Mes mains trembles, mes doigts frémissent à chaque contact. Une carte est dépliée sur une large pierre, un carnet feuilleté, avec la liste de mes derniers déplacements, la boussole stabilise doucement sa fine aiguille. .
Quelques jours de marche, deux, trois, quatre: tout dépend du temps. L'espoir, l'illusion de vaincre la monstruosité qui me ronge brille, étincelle. Renaître humain parmi les humains. Aucune autre solution.

Je me lève, déterminé. Mon visage se recompose doucement, retrouvant son absence d'expressions, son calme.


Mais derrière ce masque de cire rugissent encore les souvenirs.



Jean referma le journal poussiéreux. Il ne bougea pas pendant quelques instants, pensifs. Drôle de bonhomme. Ce désert l'a rendu complètement taré. Pauvre type...
Il regarda la carcasse putréfiée qui s'étalait devant lui. Au moins lui ne se sera pas relevé. Triste sort. Il n'avait lu que les dernières pages du journal. Le reste viendra après, ça l'occupera pendant les heures chaudes. Et ça lui rappelait qu'il lui faudra trouver de la compagnie humaine d'ici quelque temps, s'il ne veut pas finir comme ce « Meurs-bien-vite ».

Il regarda à nouveau le sac, et ses mains. D'un coup, sans raison, se met à genoux, l'attrape, et fouille à nouveau.

Voilà.

« Carnet de Route. »
Il devait retrouver des amis. Il faut bien que quelqu'un leur annonce la nouvelle... Et... ça lui fera de la compagnie.
L'homme était mort depuis très peu de temps, pas plus d'un jour. Il gardait espoir.


Quelques instants plus tard, Jean marchait, vers le Nord. Ha, le Nord...
Le soleil commençait à décliner, et allait bientôt incendier toute la Terre, signe qu'un vent glacial allait faire frissonner les hommes et les bêtes. Pour l'instant, seuls les vautours tournoyant dans le ciel au dessus de la carcasse faisaient de l'ombre à l'Orbe implacable. Quand le voyageur se fut éloigné, semblant tomber du ciel en une même masse sombre, les charognards s'emparèrent de la position.

Jean se retourna, un moment.

Après tout, ce sont peut-être eux qui sont chargés de porter l'âme jusqu'au ciel.
Et il laissa œuvrer les arracheurs d'âme.


Le ventre de la Terre s'apprêtait à vomir des hordes en haillons...
Et, lui, il chantait. D'une voix grave.
(citation)
Twinkle twinkle dead old star
Le désert baignait dans une lumière angoissante...
(citation)
... How I wander what you are...
Le bâtiment qu'il avait vu n'était plus très loin.
(citation)
Up above the world so high...
La lune refusait toujours de se montrer.
(citation)
Like a diamond in the sky
Seules les étoiles guidaient ses pas.
(citation)
When the blazing sun is gone
Le bâtiment se détachait de l'obscurité...
(citation)
When there's nothing that shine upon.
Puis, parfois, disparaissait un peu plus...
(citation)
...Then you show your little light...
Pour réapparaître à nouveau.
(citation)
Twinkle twinkle all the night
Un grondement sourd montait doucement...
(citation)
Then the traveller in the dark
... et il sentit un frisson parcourir son échine.
(citation)
Blames you for your little spark
Maudite nuit ! Et pourtant...
(citation)
He could not see wich way to go
Le bâtiment se tenait devant lui. Un vieux garage.
(citation)
If you did not twink also...
Il se retourne, et regarde plus haut... la lune...
(citation)
Now I know what you are...
... éclairait maintenant la pièce à travers l'encadrement de la porte.
(citation)
Twinkle twinkle little star...
Il murmura... Merci..

La porte se referma.



-------


Il s'arrête, ferme les yeux, et s'ouvre au silence. Seul le vent donnait ici de sa douce musique.
Avec beaucoup de douceur, il les rouvrit.

C'était un rituel, pour lui. Avant de contempler l'apocalypse, il goutait sa douce musique.

Et devant lui...
Un panneau en partie arraché, blanc – ou du moins, il devait l'être – cerclé de rouge, sur lequel se devinaient quelques lettres... Rohère.
Un village, comme tant d'autres à présent. Jean sourit en lisant, dans la partie supérieure de la pancarte « Ville fleurie. ». Même les murs semblaient fanés. Poussière...

Le village de Rohère était désert et tranquille. Comme toujours. Il sortit la boussole, et regarda sur sa droite. C'était là. L'homme traversa le village, et se dirigea vers un camp désaffecté. Quelque peu pensif... Il ne se faisait pas trop d'illusions.
Le calme lui plaisait, d'autant plus que les environs étaient si déserts qu'il n'avait guère aperçut que quelques formes humains tordues au loin. Quelques carcasses lui indiquèrent qu'il n'en a pas toujours été ainsi.
Jean pressa le pas. Il pouvait y être juste avant le zénith, il fouillerait les bâtiments pendant les heures chaudes.



« Base militaire de Rohère, entrée interdite au p... »
Jean dépassa les grillages barbelés, vers une muraille élevée à la va-vite. Cette vue avait quelque chose de grotesque. Néanmoins, il ne sourit pas.


Un mince filet d'eau glissa le long de sa langue, se précipitant dans sa gorge sèche. Il faisait très chaud, il avait eu raison d'accélérer.
Les premiers bâtiments étaient déserts, mais pas vides. Un peu d'eau et de nourriture, quelques objets utiles. Quelques cadavres aussi, qui ne se relèveront pas. Mais il n'avait pas encore trouvé ce qu'il cherchait.


Ah !
Un éclat métallique tournoya, frappa une première surface organique, puis une deuxième. Deux bruits sourds achevèrent le bal. Jean respirait lourdement, contemplant les masses inertes devant lui. Il inspira un grand coup et sa respiration s'apaisa. Il entra dans la petite pièce sombre, et donna un coup de pelle dans une fenêtre calfeutrée. Petit à petit, les rayons lumineux osèrent s'aventurer dans la pièce. Rien d'intéressant. Toujours rien.


Le soleil surplombait encore le site militaire, mais l'air s'était un peu rafraichi. Il grogna. Quelques mots, gravés sur les murs. Quelques messages, inscrits sur une planche. Mais pas ce qu'il cherchait. Jean s'approcha d'un petit entrepôt en tôles, dominé par une girouette grinçante en forme de Corbeau. Cette fois-ci, il sourit. Il s'avança.
La porte s'ouvrit dans un bruit de ferraille.
Des tables défoncées, des chaises en morceaux. Un bar saccagé. Il attrapa un jeu de carte qui trainait sur une table, et le mit dans son sac, machinalement. Quelque chose au fond retenait plus son attention. On aurait dit... un autel ! Voilà !
Une vieille boite, surplombée d'une croix en bois reposait, là, au fond, sur une petite table. Elle semblait avoir été épargnée par la tornade qui avait frappé les lieux. Il tendit lentement le bras, la main, souleva le couvercle... Voilà.

Jean semblait content. Dans sa main, un papier.

... quittons Rohère, vers l'est. J'ai caché une radio dans le plancher, essaye de nous contacter dès que possible. Fais attention à toi.

F. H. 



Crrr... crrr...

Jean déconnecta la radio. Ils étaient hors de porté, c'est sûr. Il prendrait la route de l'est demain.
Il se laissa glisser du muret, et attrapa l'émetteur radio. L'homme s'immobilisa un moment, et regarda le soleil achever de s'enfoncer dans les ténèbres.
« Le soleil agonisant donnait l'impression que la terre s'était mise à saigner... »
Il fut un moment frappé par la surprise, quand ces mots ressurgirent dans son esprit.

Meurs-bien-vite... il y a avait quelque chose de plaisant, dans ce surnom. Il l'aimait bien.

Bientôt.



-------


Il sourit
Cours ! Cours !
Il rougit
Cours ! Cours !
Et la nuit
L'acheva
De son pas
De velours

Sans un bruit
Sans secours
S'évanouit
Sans retour
L'énergie
De son être
Disparaître
Sans détour. 


Jean referma le journal. Passa sa main sur la couverture... « Meurs-bien-vite. »
Il ne comprenait pas le personnage. Mais il le percevait. Tant de doutes, pourtant !
Entre la bête et l'homme... C'était si ironique et absurde. Il aurait du appeler son journal « Chronique d'un homme qui a échoué. »
Cruel.

Il leva les yeux. La Lune lui paraissait cruelle, dans ces instants là. Il la bouda, un instant, d'un clignement de l'œil. Et les étoiles. Y-en avait-il une pour lui ? Y-en avait-il eu une pour cet homme ?
La nuit était amusée, et les silhouettes lugubres qui troublaient l'obscurité s'animaient d'un rire rauque. Ce n'était pas cruel, non. Juste absurde. Simplement une farce monstrueuse, un numéro tragique. L'humanité toute entière en rit à s'étouffer, et chaque mort défie d'une grimace hilare l'éternité. Pourquoi ? Pourquoi pas ? Son crime a-t-il été de se poser ces questions ?
Lorsqu'il l'a trouvé, il avait revêti un masque tout inédit.

Jean se leva. Inspira, et leva doucement les bras, les mains prêtes à accueillir la voute céleste. Une brise moribonde lui répondit. Néanmoins, c'était doux.


Le blanc de ses yeux luisait d'un air étrange, dans la nuit. Dans sa pupille se reflétaient quelques ombres. Quelques sons, l'air vibre, pulse. Puis une odeur, infecte et acide. Il ne respirait pas plus fort. Il ne bougeait pas. Il regardait, tout simplement.
Parfois, un râle, succédé d'acquiescements déchirants. Avec maladresse, les formes continuèrent à faire ce qu'elles ont toujours fait. Errer.
L'air s'apaisa, devint plus léger. Sa pupille ne renvoyait plus que de l'obscurité.
La scène dura quelques minutes.
Cette nuit, Jean a rêvé d'Avant. Comme souvent. Il en restait toujours un goût amer dans la bouche. Il cracha, comme pour chasser les mauvaises pensées.
Il tomba devant le poste radio, et tendit l'oreille aux crépitements et interférences. Un écho, un vieux signal, qui semblait se déplacer vers l'est, il le traquait depuis quelques jours.
Jean se releva. Pas de repos, pour ceux qui traquent les fantômes.


Le vent se levait, levait des légions de poussières. Jean enfonça son cou dans ses épaules, et un morceau de tissu voila sa bouche. Une musique familière siffla près de ses oreilles. Un dernier effort. Comme toujours, un de plus.
Le vent s'intensifia, et lui protégea ses yeux avec son avant bras. La progression était lente, laborieuse. Mais il ne s'arrêtait pas. Il ne faiblissait pas.
Le sable pénétrait dans son nez, sa bouche, fonçant vers ses poumons.

Il s'effondra, puis toussa, une fois, deux fois, trois fois. Sa respiration était rauque, mais il respirait. Il but quelques gorgées d'eau, et regarda autour de lui. Il se trouvait dans une petite maison de brique, sauvegardée par on-ne-sait-quel miracle. Peut-être avait-il une bonne étoile, oui.

La tempête faisait rage, de l'autre côté du mur de briques. Et lui, épuisé, il s'endormit.


Un petit museau gris fouinait, reniflait les tissus. D'un coup, pressentant un danger, disparut.
Jean ouvrit les yeux, et vit un rongeur détaler. Doucement, il bougea ses bras, ses jambes, se redressa. Le vent était tombé.
Il fixa le ciel un moment, et en conclut que la nuit ne tomberait pas avant quelques heures. Il n'avait pas trop dormi.
Il se leva, s'époussetta, puis entreprit de vider son sac du sable qui l'encombrait.
Comme il faisait encore très chaud, Jean décida d'attendre un peu, avant de reprendre la route. Il sortit le petit journal usé.


La lumière faiblissait à peine, mais une brise tiède annonçait la décadence du jour. Jean referma le journal, et resta là, sans bouger, quelques minutes. Pensif.

Puis il se leva, mit le sac sur son dos, et reprit la route, avec un mot du cœur pour cet abris providentiel.
Et puis... « Meurs-bien-vite. »
Ce n'était pas que le personnage. Ce n'était absolument pas le personnage. Quelque chose lui plaisait, dans ce surnom. Quelque chose de familier, qui sonnait comme un sourire, ou une grimace, joyeux et triste, rieur et lugubre.

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