Progression : 0/100
Niv. expérience : 1
Niv. expérience : 1
|
Marie, imperturbable, poursuivait sa lecture. Rien ne l'impressionne... Je pense qu'il est temps de m'attarder un peu plus sur ma vie lorsque j'étais plus jeune. Je n'ai après tout écrit que quelques bribes sur ce lointain passé... Je vais commencer par les premières années de ma vie. J'ai toujours eu beaucoup d'avance sur les autres du point de vue de ma précocité. J'avais systématiquement la note maximale, ce qui leur déplaisait fortement. Le monde, la société, ce ne sont que des imbéciles jaloux de mon intelligence, de mon génie. Mais leur bêtise est telle qu'ils privilégient les liens sociaux au travail et restent cloîtrés dans leur ignorance. Dès ma première année d'école, et donc ma première année d'intégration à la société, c'était déjà mon idée. Il existe heureusement des exceptions à cette idiotie congénitale, mais elles sont trop rares. Ces personnes avec un niveau se rapprochant du mien sont appelés autistes asperger par les ignorants. Il est ignoble d'oser les insulter de la sorte, eux qui savent où sont les bonnes priorités. Après tout, ils méritent bien leur sort de souffrance et de malheur. Le... Le... Vous ne trouvez pas vos mots. Ce n'est quand même pas à ses yeux une raison suffisante pour avoir déclenché le cataclysme?! Le peu d'humanité que vous espériez trouver en ce... Ce sadique n'est même pas présente! Comment une ordure pareille peut-elle être venue au monde? Comment n'a-t-il pas été étranglée au berceau? Il s'agit là de l'incarnation du diable! Et même pire! Vous commencez à vous demander si prier n'est pas si démodé... Mais j'en étais à mes jeunes années. Il n'existait donc personne pour faire l'ébauche d'un quasi-bout de mon talent. Même le professeur me semblait parfois moins intelligent que moi. C'était dans ces années que je commençais à me poser de nombreuses questions sur la mort, dont une particulière : y a-t-il ou non quelque chose après la mort? Je sus très vite répondre à cette question élémentaire : à trois ans et demi, je compris que nous étions des unités biologiques réglées selon un processus complexe. Chacune de nos actions sont contrôlées par notre cerveau, et chacune de nos pensées, ainsi que notre conscience, sont également dans ce même cerveau, au niveau de ce que l'on nomme le neurone unique. Dès lors, pourquoi aurait-on une âme régulée par un dieu quelconque? L'âme serait l'expression de la conscience, mais elle se situe dans le cerveau. Il n'y a donc pas d'âme. Ensuite, le dieu est une invention débile des humains, qui, par l'action commune, ont voulu expliquer ce qu'il ne comprenaient pas grâce à une entité supérieure dont les desseins sont impénétrables. Mais maintenant, nous sommes capables de comprendre chaque réalité et d'en connaître la cause et les conséquences. Tout ce qui n'a pas pu être expliqué par l'action divine l'est maintenant par le truchement des lois physiques telles que les lois de la matière ou les lois quantiques. La seule exception notable est la création de l'univers. Mais là encore il s'agit de la bêtise humaine, qui tient absolument à mettre une limite à l'infini que l'homme ne sait pas concevoir. Il veut placer une origine des temps là où il n'y en a pas : pourquoi n'y aurait-il pas pu y avoir toujours quelque chose, et pas de début? Il n'existe dès lors plus de création de l'univers. De plus, dieu est censé être une entité parfaite. Or, il n'en est rien : la perfection n'est pas de ce monde. Ce que j'ai fait en est la preuve indubitable : si un dieu existait, il aurait empêché ça. Puisque tout s'explique sans dieu et que certaines choses ne pourraient pas arriver sans lui, alors il n'existe pas. Bon, ben prier est peut-être bien démodé, en fait?... Intérieurement, vous savez qu'il a raison : scientifiquement et psychologiquement : dieu n'aurait pas laissé tomber le monde qu'il a créé dans la déchéance à ce point. Mais alors, s'il n'existe pas de divinité, et que le surnaturel est impossible, cela signifie qu'après la mort, il n'y a... Rien. C'est le néant total, le plus absolu, lorsque les neurones sont détruits par hypoxie puis par décomposition pure et simple, notre conscience, notre pensée, tout est effacé à jamais. Les sens sont désactivés, et on est coupés de tout. Plus rien, pendant un temps infini. La fin sans possibilité de retour. Si encore il y en avait un, ce serait comme ouvrir et fermer les paupières, mais c'est ce rien qui s'immisce à l'infini... Même maintenant, lorsque j'y pense, mon cœur rate quelques battements. Quand j'avais seulement trois ans, c'était la seule chose capable de me terrifier et c'est ce qui m'a poussé à étudier la mort., pour toujours la repousser, car je ne veux jamais la connaître, connaître ce néant que de toutes façons je ne connaîtrai pas puisque je ne pourrai pas le réaliser. Il me fallait à tout prix éviter ça et l'éviter au monde. Cette horreur pourrait avoir peur de quelque chose?!? Et aurait en plus voulu sauver le monde entier de ce qui lui fait si peur? En soi, il s'agit toujours d'égoïsme concentré, puisque peu de personnes doivent avoir peur de ce rien. Du moins, vous n'êtes pas concerné. Y aurait-il un semblant d'humanité chez ce personnage? |
0 