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Niv. expérience : 1
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J’extirpe un « Manuel des Castors Juniors » aux pages racornies. L’antiquité. Le tome porte sur la nature et je m’écorche les yeux à déchiffrer les mots dans la pénombre. Je dévore le monument littéraire aussi vite que possible… L’envie me prend d’essayer les trucs qui figurent dans ce bouquin. Pour me convaincre, je me dis que le despote est sorti et qu’il ne rentrera pas avant tard ce soir. Qui me dénoncerait ? Si je passe inaperçu… Je peux bien faire ce que je veux. Après tout, je ne suis pas un mouton tout bêêêête ! J’avance vers les portes sur la pointe des pieds en scrutant les alentours. Aucun signe de vie en ville. Le courage de Fifi, Riri et Loulou s’éveille en moi, rien ne m’arrêtera ! Je feuillette les pages en marchant, la nuit est sans nuage, chaude, la lune illumine suffisamment mon chemin. Pour la première fois, l’idée de camper à la belle étoile, tel un ermite, me traverse l’esprit. J’entends une rumeur lointaine à ma gauche. On dirait les explorateurs, direction sud-est. Je décide de me rapprocher d’eux furtivement, assez près pour distinguer quelques mots… Tapi, j’écoute… – … quoi de la ville ? – Bah… On est plus de trente-cinq de nos gars, donc seulement deux ou trois indésirables à surveiller. S’ils font ce que je dis c’est ok, sinon, à la première incartade… La silhouette fait un geste que je n’arrive pas à voir mais cela fait bien rire la bande. Ils poursuivent l’expédition. Je reste adossé à la grosse pierre. « Deux ou trois indésirables »… Je frémis, c’est moi ça ! Quand je me suis réincarné, je les ai suivit… Je n’ai pas été invité… Et ils se connaissent tous… Je n’aimerais pas, pas du tout, revivre les aléas désagréables de la ville précédente. C’est donc maintenant ou jamais pour tester les trucs de ce livre, illico presto. Dommage, j’aurais voulu camper. Les instructions pour aménager une cachette sécuritaire sont tellement simples et claires… Si faciles à comprendre… Fascinant… Épuisé par ma balade nocturne, je lève la tête pour m’assurer que j’avance dans la bonne direction. Le spectre de la ville est bien à l’horizon droit devant. Beaucoup plus loin que je pensais par contre. Je ne comprends pas… J’ai à peine marché avant de bifurquer vers le groupe, ensuite j’ai repris sensiblement le même chemin pour le retour en buvant ma ration d’eau… Je devrais être plus proche, et pas qu’un peu. Mes jambes renoncent bientôt à me soutenir tandis que mon estomac hurle à la lune. Je suis déjà demeuré coincé par la fatigue et, par expérience, je sais que la chaleur n’aide en rien… Je panique, il me faut un remontant. Lire en marchant tue. Je m’effondre, assis. Le livre m’échappe et s’ouvre. Je regarde la page, comme hypnotisé, haletant. Je pourrais grignoter le papier… Ce n’est qu’au bout de plusieurs minutes que mon cerveau assimile le texte : comment trouver des vers de terre. Je creuse, vaguement, non convaincu. Sous une pierre, le sol correspond. Je fouille… La texture est onctueuse. Je n’avais jamais remarqué que le sable avant… Je vérifie autour, au cas où il y aurait un témoin de mon exploit. Six gros vers sales se tortillent dans ma main. Je les contemple, abasourdi. Ça se mange ? Je me pince le nez, j'inspire. J’avale. La sensation en bouche laisse à désirer, mais la collation contente ma panse habituée aux menus d’oiseaux. C’est définitivement ce que j’appelle l’énergie du désespoir. Je franchi enfin les portes. Normalement, j’aurai encore la capacité de bosser un peu aux chantiers… Au moins je n’aurai pas l’air d’avoir rien foutu en ville. Pour le moment, tout s’est déroulé magnifiquement, enfin, je passe comme un voleur… – Hey ! Toi ! Je fige. |
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