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Niv. expérience : 1
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Je gèle sur place en entendant la voix féminine. Je me retourne, pas d’erreur. Elle vient bien de s’adresser à moi sur un faux ton de… de… – Salut ! Hi ! Hi ! T’es nouveau ! Je t’ai jamais vu avant ! D'hystérique pré-pubère. – Heu… He… ouais… Elle glousse. Aigüe. – Hi ! Hi ! Enchantée ! Je me présente, les gars m’appellent Deep ! Elle me tend la main, le bras droit devant elle, compressant les deux éléments constitutifs de sa poitrine généreuse. La fosse est abyssale. – C’est… heu… je… – T’inquiète pas ! Je fais cet effet là tout le temps ! Hi ! Hi ! Hi ! J’arrache mon regard vers son visage. Je suis terrifié. L’innocence a survécu à la catastrophe. Deux immenses yeux vides, profondément noisettes, sertis d’un éventail de cils me fixent. Le sourire trop large sculpté à même le visage ovale qu’encadre une fine tignasse blonde sale m'éblouit. Elle me dépasse d’une dizaine de centimètres, en talons aiguilles. – Viens ! Je vais te faire visiter ! Ses serres se referment autour de mon poignet et elle me traîne en gambadant autour de la ville. Le soleil pointe à peine son nez, elle réveille tout le monde. – Bon ! Pour commencer… Faut que tu saches qu’on est comme une grande famille ! On se serre les coudes, comme des frères et sœurs ! Hi ! Hi ! Hi ! Tiens, le gars couché là c’est LaFin, le portier ! Il les ferme toujours à l’heure ! Deep poursuit son chemin tandis que le fameux LaFin se bouche les oreilles en grommelant. Réaction que je reverrai souvent. – Ha ! Là, c’est la banque ! Mais je suppose que tu as déjà vu une banque non ? – Oui, j’ai… – L’important c’est d’y déposer, mais pas d’y retirer ! C’est facile, demande toujours la permission avant ! Ici, on a le puits… Là, tu vois, c’est là qu’on va faire la Tour de guet ! Il est obligatoire d’aller scruter tous les jours ! Moi, j’ai le vertige, alors généralement un gars sympa m’accompagne ! Hi ! Hi ! Elle m’adresse un clin d’œil et me jette quasiment par terre avec un coup de coude coquin. Et ça continu, pas de repos de la journée. Elle croit pertinent de me montrer les portes, la pancarte de la ville, le Forum, la muraille, son lit de camp, la bouffe périmée, les objets inutiles, le registre, la lune, le miroitement des grains de sable, ses cuticules rebelles… Je suis comme la coqueluche d’une de ses énième réceptions mondaines. Bonjour par-ci, enchanté par-là… – Hi ! Hi ! Ha ! Lui, tu vois, par contre, je le connais pas ! On a toujours des nouveaux en ville, c’est plus divertissant ! Je m’occuperai de lui demain… C’est agréable de rencontrer des nouvelles personnes, tu trouves pas ? – En fait, je… – Ha ! Regardes ! C’est Petrouchka ! Fais pas attention à son apparence, en réalité elle est très gentille ! Hi ! Hi ! Hi ! La préposée à l’Atelier, c’est elle ! Ho ! Là ! Vite ! Faut que je te présente à ce garçon, tu vas trooop l’apprécier ! Elle déblatère constamment des commentaires gênants à propos des personnes comme si elles étaient absentes. Petrouchka, par exemple, n’est pas si moche. Elle me semble légèrement molle et quelque peu antisociale, mais l’apocalypse qui a annihilé nos familles justifie bien un caractère de vache, non ? Quoi qu’il en soit, après avoir été présenté à tous les citoyens qui eux se foutent carrément de moi, après avoir contemplé jusqu’à la plus infime tache de rouille en écoutant spéculer sur son origine futile, après avoir récolté une haleine de bouse à force de laisser ma caverne à viande au chômage, je croyais enfin mériter la paix… Espoir vain… La nuit tombe, introduisant des pas, des bruits de ferraille… Le retour des explorateurs. – Oh… Ils reviennent avec les ressources, je vais te laisser… Pour la première fois je décèle un trémolo dans sa voix. De la peur ? De la soumission ? Un malaise s'empare de moi. Je reconnais le chef parmi la meute… Je sais comment il s’appelle, j’ai déjà entendu vaguement son surnom, soufflé à mi-voix ou avec une profonde admiration. Toutakou. |
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