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Niv. expérience : 1
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– Deep… Tu penses quoi de Toutakou ? Ma question sans détour l’étonne un peu. Je l’ai posé d’un ton curieux, pas du tout investigateur. – Heu… Dans quel sens ? – Bah, je sais pas, tu penses quoi de comment il dirige la ville, de comment il se comporte avec toi… Comment tu le trouves en général… – En général, il est correct. Il se dévoue corps et âme pour la ville. Il m’a dit qu’il n’aimait pas être autoritaire, mais qu’il n’avait pas le choix, car sinon les gens feraient n’importe quoi, hi hi !… Il a dit qu’il devait sacrifier son image et endosser le rôle de chef, parce qu’il est le seul à pouvoir le faire. Il a dit qu’il ferait tout pour me protéger. Il a dit que tout ce qu’il fait, il le fait dans l’optique du bien de tous et ça ne sert à rien de se poser des questions, parce qu’il arrange tout. – Mais Deep, je ne t’ai pas demandé ce que Toutakou a dit, je veux savoir ce que TOI, tu penses. Si elle semblait surprise tout à l’heure, je crois que je viens de définitivement la jeter sur le cul. Elle ouvre grand les yeux, la mâchoire pendante. Ses doigts lissent longuement sa tignasse, comme à la recherche d’une puce de réponse. Elle ne sait plus quoi dire. C’est sans doute la première fois depuis des lustres qu’on lui demande son avis et, surtout, qu’on a envie de l’entendre. Ça travaille dans sa tête. Cherche-t-elle à éclaircir mentalement ce qu’elle n’a jamais formulé à voix haute ou me concocte-t-elle un mensonge pour détourner le sujet ? J’attend impatiemment, soulevant toujours des pelletés de sable, mine de rien, semblant affairé à ma besogne. Après quelques instants, son silence me démange trop, je me retourne vers elle, tout juste à temps pour apercevoir son visage douloureux et ses yeux emplis de larmes disparaître derrière ses mains. Aussitôt, son corps de soulève d’énormes sanglots sonores. – Mais voyons Deep ! Là, qu’est-ce qui se passe ? Je m’empresse de la rejoindre. Ma main flotte timide au dessus de son épaule. C’est elle qui se jette dans mes bras. Elle m’étreint, son gros nounours. Sa voix se déchire. – Toutakou est le pire mec que j’ai eu ! Il me traite comme une chienne ! Il fait semblant de m’écouter quand il y a d’autres personnes, mais quand on est seuls, il me dit toujours « ferme ta gueule ! » Il est méchant ! J’ai dit que j’allais partir, mais il m’a menacé ! Il a dit qu’il avait des contacts et qu’ils me retrouveraient ! Je ne sais pas quoi faire ! Je n’en peux plus ! Il faut toujours faire semblant ! Toujours semblant ! Deep inonde mon épaule. Je lui tapote le dos; que puis-je faire d’autre ? Je lui laisse cette opportunité de se libérer de son trop plein d’émotions refoulées. Elle pleure longtemps. Lorsqu’elle se calme enfin, je m’écarte pour lui faire face. Je dois réprimer un accès d’émoi devant tant de fragilité. – Deep, je peux t’aider. Je peux te dire comment instaurer une distance entre toi et Toutakou. Elle reste silencieuse, acquiesce. Je lui explique comment changer la clé de son âme. Elle écoute attentivement et, par ses yeux, je sais qu’elle effectue chacune des instructions que je lui dicte. À la fin, elle me remercie en un souffle. Elle s’enferme alors dans un mutisme que je ne lui avais jamais connu. Sa façade est tombée. Elle n’aura plus à jouer son personnage avec moi. |
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